« Bénies les mains qui s´ouvrent pour accueillir les pauvres et les aider : ce sont des mains qui apportent espérance. Bénies les mains qui vainquent les murs de la culture, la religion et la nationalité versant l´huile de la consolation sur les plaies de l´humanité. Bénies les mains qui s´ouvrent sans rien demander en échange, sans des « mais » ni des « conditions » : ce sont des mains qui font descendre sur les frères la bénédiction de Dieu ». (Saint Paul VI dans l´ouverture de la deuxième session du Concile Vatican II, le 29 septembre 1963).
À la fin du Jubilé de la Miséricorde, en 2017, le Pape François institua, le dimanche XXXIII du temps Ordinaire, la Journée Mondiale des Pauvres, pour que, « partout dans le monde les communautés chrétiennes deviennent chaque fois plus et mieux le signe concret de l´amour du Christ pour les derniers et les plus nécessiteux ».
En chaque Journée le Pape nous a offert une Parole de l´Écriture qui nous illumine et nous aide à être compatissants face à la souffrance de nos frères. Je vais remarquer ici certaines parties des cinq messages. Dans la Journée I, avec le texte biblique : « Mes enfants, n´aimons pas de parole et de bouche, mais en vérité et avec des œuvres » (Jn 3,18), il nous invita à la cohérence de vie. Il insista en ce que « l´amour n´ admet pas des excuses : celui qui veut aimer comme Jésus aima, doit rendre sien son exemple, surtout lorsqu´il s´agit ´aimer les pauvres ».
Cela fût très significatif pour la famille Tertiaire Capucine que, comme en plusieurs de ses écrits, dans la I Journée Mondiale des Pauvres, le Pape présenta à Saint François d´Assise comme référant d´amour aux pauvres par sa cohérence de vie. En cette occasion, il dit de lui : « Il garda les yeux fixés dans le Christ, c´est pourquoi il fut capable de le reconnaitre et le servir dans les pauvres… », citant Test 1-3 ; et il souligna que le témoignage de François d´Assise montre le pouvoir transformateur de la charité et le style de vie des chrétiens.
Avec le texte biblique de la II Journée « Ce pauvre cria et le Seigneur l´écouta » (Ps 34,7) le Pape souligna que Dieu « écoute », « répond » et « libère » le pauvre à travers nous. « Le salut de Dieu adopte la forme d´une main tendue vers le pauvre, qui accueille, protège, et rend possible d´expérimenter l´amitié dont il a tellement besoin. À partir de cette proximité concrète et tangible, commence un authentique itinéraire de libération ». Aussi, avec ce message, il fit un fort questionnement: « Qu´exprime le cri du pauvre si ce n´est sa souffrance et solitude, sa déception et son espérance ? Comment est-ce que ce cri, qui parvient jusqu´à la présence de Dieu, ne peut pas arriver à nos ouïs, nous laissant indifférents et impassibles ? ».
Dans da III Journée il prend à nouveau un psaume : « L´espérance des pauvres ne sera jamais frustrée » (cf. Ps 9,19). Le Pape, avec réalisme et avec le prophétisme qui le caractérise, dénonce les nombreuses façons des nouveaux esclavages auxquels sont soumis aujourd´hui des millions d´hommes, femmes, jeunes et enfants. Il insiste surtout dans les personnes qui ont dû abandonner leurs terres : « Comment oublier, en plus, les millions d´immigrants victimes de tant d´intérêts cachés, si souvent instrumentalisés à des fins politiques, auxquels ont nie la solidarité et l´égalité ? Et que dire des nombreuses personnes marginalisées et sans foyer qui déambulent dans les rues de nos villes ? ».
Il fit aussi référence à l´stigmatisation qui, tel une croix, en tous les temps et lieux doivent charger les pauvres sur leurs vies : « Considérés généralement comme des parasites de la société, on ne pardonne pas aux pauvres même leur pauvreté. On est toujours prêts pour les juger. Ils ne peuvent pas se permettre d´être timides ou de se décourager ; ils sont vus comme une menace ou comme des gens incapables, uniquement parce qu´ils sont pauvres ». Et encore, il place Jésus comme pauvre et avec les pauvres : « Devant cette multitude innombrable d´indigents, Jésus n´eut pas peur de s´identifier avec chacun d´eux : ‘ chaque fois que vous l´avez fait avec l´un des ceux-ci, mes frères les plus petits, c´est avec moi que vous l´avez fait’ (Mt 25,40). Fuir cette identification équivaut à falsifier l´Évangile et atténuer la révélation ».
Dans la IV Journée « Tend la main au pauvre » (cf. Si 7,32), le Pape insista en ce que « la communauté chrétienne est appelée à s´impliquer en cette expérience de partage, avec la conscience qu´ il ne lui est pas permis de la déléguer à d´autres. Et pour appuyer les pauvres il est fondamental de vivre la pauvreté évangélique en première personne. Le cri silencieux de tant des pauvres doit rencontrer le peuple de Dieu en première ligne, toujours et partout, pour leur donner voix, les défendre et se solidariser avec eux devant tant d´hypocrisie et tant des promesses non accomplies, et les inviter à participer dans la vie de la communauté. Rappeler à tous la grande valeur du bien commun est pour le peuple chrétien un engagement de vie, qui se réalise dans la tentative de ne pas oublier aucun de ceux dont l´humanité est violée dans les besoins fondamentaux ».
Et cette année, dans la V Journée, le Pape François a pris un texte évangélique polémique : « Parce que, des pauvres, vous en aurez toujours avec vous » (Mc 14,7). Il y en a qui, peut être pour s´évader de l´engagement avec les pauvres, disent : Si Jésus assura « Vous en aurez toujours des pauvres avec vous», si c´est une réalité qu´ils seront toujours avec nous, nous ne devrions pas nous préoccuper pour eux… ils seront toujours là, c´est une réalité qu´on ne peut pas surmonter…
Mais le Pape François contextualise le texte et nous aide à mieux le comprendre : « Jésus prononça ces mots en un repas de Béthanie… Selon raconte l´évangéliste, une femme entra avec un flacon l´albâtre rempli de parfum de grande valeur et le versa sur la tête de Jésus. Ce geste suscita grand étonnement et donna lieu à des interprétations diverses.
La première fut l´indignation de quelques-uns, parmi eux les disciples qui, pensant à la valeur du parfum, quelques trois cents deniers, équivalents au salaire annuel d´un ouvrier, ils ont pensé qu´il aurait été mieux de le vendre et de donner aux pauvres l´argent obtenu. Selon l´évangile de Jean, ce fût Judas qui exprima cet avis : « Pour quoi ne pas le vendre pour trois cents deniers pour les donner aux pauvres ? » Ce n´est pas par hasard que cette dure critique sorte de la bouche du traître, cela prouve que ceux qui ne reconnaissent pas les pauvres trahissent l´enseignement de Jésus et ne peuvent pas être ses disciples.
Jésus dit « Laissez-la ! Pour quoi la déranger ? Elle a fait une bonne œuvre avec moi » (Mc 14, 6). Jésus les rappelle que le premier pauvre c´est Lui, le plus pauvre parmi les pauvres, parce qu´Il les représente tous. Et c´est aussi au nom des pauvres, des personnes marginalisées et discriminées, que le Fils de Dieu accepta le geste de cette femme. Elle, avec sa sensibilité féminine, démontra être la seule à comprendre l´état d´âme du Seigneur. Cette femme anonyme, destinée peut-être à représenter par ce geste tout l´univers féminin qu´au long des siècles n´aura pas de voix et souffrira violence, inaugura la significative présence des femmes qui participent au moment culminant de la vie du Christ : sa crucifixion, mort et sépulture, et son apparition comme Ressuscité. Les femmes, si souvent discriminées et maintenues à la marge des postes de responsabilité, dans les pages des évangiles sont, par contre, des protagonistes dans l´histoire de la révélation.
Cette forte « empathie » entre Jésus et la femme, et la façon dont Lui a interprété son onction, en contraste avec la vision scandalisée de Judas et des autres, ouvre un chemin fécond de réflexion sur le lien inséparable qu´il y a entre Jésus, les pauvres et l´annonce de l´Évangile. « Je ne me fatigue pas de répéter que les pauvres sont des vrais évangélisateurs parce qu´ils furent les premiers à être évangélisés et appelées à partager la béatitude du Seigneur et son Royaume (Mt 5,3) ».

Sœurs et frères, comme famille Tertiaire Capucine sommes-nous prêts à accueillir l´appel concret et urgent du Seigneur, au travers du pape François dans la V Journée Mondiale des Pauvres ? Sommes-nous déjà en train de répondre ? « Nous ne pouvons pas attendre qu´on frappe à notre porte, il est urgent que ce soit nous qui allions les rencontrer dans leurs maisons, dans les hôpitaux et dans les résidences d´assistance, dans les rues et dans les coins obscurs où parfois ils se cachent, dans les centres de refuge et d´accueil… Il st important comprendre comment ils se sentent, ce qu´ils perçoivent et quels désirs ont dans leur cœur ».
Sr. LILIA CELINA BARRERA RAMÍREZ, TC